Née de la jurisprudence dans les années 70 comme une réplique au découpage frauduleux d’une entreprise en plusieurs sociétés, l’UES apparaît aujourd’hui comme un des cadres naturels de la mise en place de la représentation du personnel. Fondamentalement, la reconnaissance d’une UES a pour objet « d’assurer la protection des droits des salariés appartenant à une même collectivité de travail, en permettant à cette fin une représentation de leurs intérêts communs ». Cass. soc. 16 décembre 2008 n° 07-43875 (P).
Quelles sont les entités pouvant faire partie d’une UES ? Que faut-il entendre par « entreprises juridiquement distinctes », expression utilisée par l’article L 2322-4 du code du travail au sujet de l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise ?
Des établissements ne peuvent constituer une UES
« Une unité économique et sociale ne peut exister qu’entre des entreprises juridiquement distinctes et non entre les établissements d’une ou de plusieurs entreprises » Cass. soc. 13 janvier 1999 n° 97-60782 (P) Par « entreprises juridiquement distinctes » il faut comprendre personnes morales (sociétés, associations) juridiquement distinctes. « Il ne peut y avoir d’unité économique et sociale reconnue par convention ou par décision de justice qu’entre des personnes juridiquement distinctes prises dans l’ensemble de leurs établissements et de leurs personnels ». Cass. soc. 7 mai 2002 n° 00-60424 (P).
Des sociétés sans personnel peuvent faire partie d’une UES
« La circonstance qu’une société n’ait pas de personnel ne l’exclut pas de l’unité économique et sociale pour la mise en place d’un comité d’entreprise commun ». Cass. soc. 21 janvier 1997 n° 95-60833, n° 95-60840, n° 95-60839 et 95-60838 (P) « L’unité économique et sociale ayant pour finalité la défense des intérêts de la communauté de travailleurs dans un périmètre donné, le tribunal d’instance a pu décider que la circonstance que la société Amadeus France SNC n’ait pas de salariés ne faisait pas obstacle à la reconnaissance d’une unité économique et sociale entre les deux sociétés pour la désignation d’un délégué syndical ». Cass. soc. 24 novembre 2004 n° 03-60329 (P) En l’occurrence « des salariés de la société Amadeus France services travaillaient de fait pour la société Amadeus France SNC, dont les moyens administratifs et commerciaux étaient partagés avec la société Amadeus France services, a fait ressortir qu’il existait une communauté de travailleurs intéressés par les activités complémentaires des deux sociétés dont la direction était commune ».
Une société holding peut faire partie d’une UES
« Dès lors qu’il constate que les éléments constitutifs d’une unité économique et sociale sont réunis entre des sociétés d’opérations, le tribunal d’instance qui intègre au sein de cette unité économique et sociale la société holding qui détient le pouvoir, justifie légalement sa décision ». Cass. soc. 26 janvier 2005 n° 04-60192 (P) (société composée que de son président directeur général, de son directeur administratif et d’une attachée juridique).
UES et groupe doté d’un comité de groupe, des notions incompatibles
S’il existe un comité de groupe entre plusieurs sociétés, l’UES ne peut être reconnue. Pour la Cour de cassation « la notion d’unité économique et sociale et celle de comité de groupe sont incompatibles » Cass. soc. 20 octobre 1999 n° 98-60398 (P).
Confirmant sa jurisprudence elle ajoute « qu’il résulte de l’incompatibilité entre les notions d’unité économique et sociale et de groupe doté d’un comité que leurs périmètres respectifs servant à la mise en place d’institutions représentatives du personnel différentes doivent être comparés à la date de la requête tendant à la reconnaissance de l’unité économique et sociale compte tenu de leur évolution depuis leur mise en place ». Cass. soc. 25 janvier 2006 n° 04-60234 (P).
En revanche, « la simple annonce de la constitution d’un groupe pouvant inclure les diverses sociétés en cause, ne peut à elle seule faire obstacle à la reconnaissance d’une unité économique et sociale entre ces sociétés, antérieurement à la mise en place d’un comité de groupe ». Cass. soc. 17 décembre 2003 n° 02-60445 (P).
De même, « l’existence d’un comité de groupe couvrant l’ensemble des sociétés du groupe dont font partie les deux personnes morales entre lesquelles il est demandé de reconnaître l’existence d’une unité économique et sociale n’exclut pas la mise en place d’un comité central d’entreprise commun à ces deux sociétés ». Cass. soc. 30 mai 2001 n° 00-60111 (P).