Il est fréquent pour le salarié de devoir se constituer des preuves en vue d’un éventuel contentieux avec son employeur. La clé USB peut être un moyen pour stocker ce genre d’informations. Un arrêt récent concernant son utilisation au travail nous permet de revenir sur les règles entourant les l’utilisation des nouvelles technologies (soc. 12 février 2013, n° 11- 28649, PBS, P).
La clé USB
En l’espèce, une salariée avait enregistré des informations confidentielles de son entreprise sur sa clé USB. Pendant son absence, l’employeur a consulté le contenu de la clé USB et a donc licencié la salariée sans doute pour une faute découlant de la violation de son obligation de loyauté.
D’après la cour d’appel, les preuves retenues contre la salariée avaient été obtenues de manière illicite. Cela n’est pas l’avis de la Cour de cassation pour qui le contenu de la clé USB était présumé être utilisé à titre professionnel. De ce fait, l’employeur pouvait y avoir accès durant son absence. La preuve n’aurait pas été opposable à la salariée si les fichiers de la clé USB, consultés par l’employeur, portaient la dénomination « personnel ».
Les fichiers
L’employeur peut ouvrir les fichiers personnels de ses salariés en présence du salarié ou après l’avoir appelé (soc., 17 mai 2005, n° 03-40017, CathnetScience, P). Ce principe souffre cependant d’une exception sur laquelle la Cour régulatrice ne donne aucune précision : le risque ou un évènement particulier.
Il est à noter que l’existence d’une sphère personnelle est confirmée par cet arrêt car l’ouverture des fichiers indiqués comme personnels suit un régime particulier. A défaut de la mention « personnel », le fichier est présumé avoir un caractère professionnel (soc. 18 octobre 2006, n° 04-47400, JEPS, P). En conséquence, à défaut de cette mention, l’employeur pourra y avoir accès en l’absence du salarié (soc. 15 décembre 2010, n° 08-42486, ARP Sélection, D).
La Cour de cassation a une interprétation très stricte de cette mention. Selon elle, « la seule dénomination "Mes documents" donnée à un fichier ne lui confère pas un caractère personnel » (soc. 10 mai 2012, n° 11-13884, Nouvelle communication téléphonique, P+B).
Les connexions
A l’instar des fichiers informatiques, les connexions établies durant le temps de travail sont présumées avoir un caractère professionnel (soc. 9 juillet 2008, n° 06- 45800, Entreprise Martin, P). Par conséquent, en l’absence de mention « personnel », l’employeur pourra y accéder hors sa présence (soc. 9 février 2010, n° 08- 45253, Relais jeunes Charpennes,D). Supposons qu’un salarié en ait abusé à des fins étrangères à son activité en prenant le soin de les identifier comme « personnel », l’employeur ne pourra y avoir accès qu’en présence du salarié.
Le courrier électronique
En vertu du secret des correspondances, l’employeur ne peut prendre connaissance des courriels intitulés « personnel » malgré une interdiction d’utilisation non professionnelle de l’outil informatique (soc. 2 octobre 2001, n° 99-42942, Nikon, P ; soc. 12 octobre 2004, n° 02-40392, Sulzer orthopédie Cedior, P). L’ouverture des courriels privés est donc proscrite même en présence du salarié. La seule solution est de recourir à l’article 145 du Code de procédure civile (soc. 23 mai 2007, n° 05-17818, Datacep, P ; soc. 10 juin 2008, n° 06-19229, Mediasystem, P) : « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige,
les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ». Il existe plusieurs conditions à l’application de cet article : aucune juridiction ne doit avoir été saisie, la demande doit intervenir à un stade où les relations employeur/salarié sont normales, un motif légitime doit apparaître et la mesure d’instruction doit être légalement admissible. Les deux premières conditions ne posent pas de difficultés particulières. L’exigence du motif légitime impose au juge de déterminer si la preuve des faits reprochés est utile dans l’hypothèse d’un procès futur et s’il existe un risque de disparition des preuves. La dernière condition octroie seulement au juge la possibilité d’ordonner des mesures d’instruction. Ces conditions devront être scrupuleusement respectées afin de convaincre le juge de mettre en œuvre cette procédure non contradictoire. Une procédure contradictoire permettrait au salarié d’effacer les preuves compromettantes.
Les messages vocaux
Au sujet de la messagerie vocale, la Cour de cassation nous explique que « si l’enregistrement d’une conversation téléphonique privée, effectué à l’insu de l’auteur des propos invoqués, est un procédé déloyal rendant irrecevable en justice la preuve ainsi obtenue, il n’en est pas de même de l’utilisation par le destinataire des messages téléphoniques vocaux dont l’auteur ne peut ignorer qu’ils sont enregistrés par l’appareil récepteur » (soc. 6 février 2013, n° 11-23738, Antuna, P).
Les SMS
Dans le même ordre d’idées, le SMS (short message services) constitue un mode de preuve licite ne nécessitant pas une information préalable. La Cour de cassation estime que l’auteur d’un SMS sait pertinemment que son message restera enregistré dans le téléphone mobile récepteur (soc. 23 mai 2007, n° 06-43209, SCP notariale, P). La preuve obtenue ne sera pas rejetée du débat et donc opposable à la partie adverse.